samedi 12 janvier 2008

Beit el mouna


La deuxième pièce ,proche de la cuisine ,était beit el mouna(chambre à provisions).Le long des ses murs courrait une étagère percée de trous dans laquelle venaient s'encastrer des jarres de poteries vernies destinées à recevoir les différents couscous :le fin pour les invités et les jours de fêtes , le plus gros pour les jours ordinaires,le couscous de blé qu'on cuisait simplement avec des légumes car il était plus nourrissant ,et enfin les grosses graines pour préparer la mhammas aux légumes ; une autre jarre du borghol , blé cuit puis concassé , que l'on faisait en soupe les froides journées d'hiver , avec des fèves séchées et beaucoup d'ail. Les pois chiches , les haricots et le kaddid , tous avaient leur place dans des récipients en terre cuite .Les graines d'orge ou frik, utilisées dans de succulentes chorbas, la semoule destinée à la confection du pain et des gâteaux ,figuraient en bonne place et surtout l'huile d'olive qui ,pour sa part , régnait en maître absolu dans cette pièce ; tandis que les épices emplissaient les pots de terre de couleur verdâtre et parfumaient l'atmosphère , le rouge des piments doux égayait les étagères.
On emmagasinait aussi dans cet office des quartiers de tomates salées et séchées au soleil ; au moment voulu ,on les lavait puis on les réduisait en purée , grâce au mehez , l'indispensable pilon! Leur couleur pourpre tranchait à côté de la mloukhia qui s'imposait par sa poudre verte obtenue en broyant les larges feuilles d'un tout petit arbuste , la corète.
Ces trésors culinaires étaient minutieusement préparés par les femmes ,en été ,pendant les longues journées brûlantes de chaleur. les plantes aromatiques n'étaient pas oubliées pour autant ,elles servaient à corser certains plats ;en effet , feuilles de laurier ,romarin, thym,embaumaient ce lieu enchanté qui reluisait sous l'or et le cuivre des citrons et des variantes ,conservés dans du sel et du vinaigre pour relever les sauces et les salades. Bref ,tout y était ,même l'anis ,le besbes et le jeljlène(grains de sésame) avec lequel on parfumait le bon pain de semoule pétri à la maison! La bssissa également était rangée dans des récipients après avoir été grillée et réduite en poudre.
C'était Tunis 1920
Maherzia BOURNAZ

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